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MARIONNETTES ET MUSIQUES
24 novembre 2008

LA MUSIQUE TEXTE THEATRAL

MM1_BDJ’ai un problème : quand il y a de la musique dans l’air, quelle qu’elle soit et quel qu’en soit le volume sonore, je l’écoute. Je n’ai pas dit : « je l’entends », mais bien : « je l’écoute ». A la radio, au cinéma, au théâtre bien sûr, mais aussi au supermarché, dans les cafés, les restaurants, pendant un temps aussi - vous rappelez- vous ? - dans le métro, dans les aéroports, les parkings, dans les salles d’attentes des docteurs, parfois même dans leur cabinet, sans parler des répondeurs téléphoniques, des messages d’attentes interminables avec leurs Printemps-de-Vivaldi ou Petite-Musique-de-Nuit-de-Mozart en boucle, coupés au milieu d’une mesure et reprenant au début inlassablement, irrévocablement, jusqu’au dégoût inéluctable… Souvent, elle m’empêche de réfléchir : au restaurant, par exemple, l’omniprésence musicale m’oblige à un effort supplémentaire de concentration pour suivre la conversation. Dans les magasins, sa fonction est claire : envahir le cerveau d’informations musicales pour le rendre disponible (tient, ça me rappelle quelque chose, ou quelqu’un…) à tout ce qu’il n’était pas venu chercher là !

Erik Satie avait inventé un concept prémonitoire : celui de la Musique d’Ameublement. A l’époque il s’agissait d’une boutade un peu provocatrice : plusieurs musiciens placés à différents endroits d’une même pièce jouaient des musiques sans aucun rapport les unes avec les autres – il s’agissait  une musique donnée, selon les dires de Satie, « pour qu’on ne l’écoute pas ». Nous sommes aujourd’hui dans une démarche inversée, et la joyeuse provocation a cédé la place à un cynisme glacial : toutes les musiques sont potentiellement des musiques d’ameublement. Non pas toutes, bien sûr ! Mais celles qui ne le sont pas n’ont de toute façon pas droit au chapitre : musiques contemporaines, élitistes et incompréhensibles ou œuvres du répertoire autres que les deux ou trois symphonies de Mozart, Beethoven ou Vivaldi que tout le monde connaît. Pour exagérer un peu, il y aurait donc deux sortes de musiques : celles qu’on n’écoute pas et celles qu’on n’entend jamais.

Il me semble que, de la même façon qu’un acteur ou un musicien se met au service du texte (littéraire ou musical) qu’il interprète, un metteur en scène, s’il fait le choix d’intégrer une musique du répertoire, doit se mettre au service de la musique qu’il a choisi, même si elle n’est pas au centre de son propos – que ce soit du rock, de la chanson ou de la musique dite savante (et non une musique de scène qui, elle, est écrite pour le spectacle). A défaut, la musique sur scène reprend sa place de « musique d’ameublement » : elle devient décorative, sert à donner du rythme là où il en manque, comble un vide, enjolive un noir. On peut dans ce cas tout se permettre : interrompre une chanson au milieu d’une phrase parce qu’on n’a pas besoin de plus, « shunter » un morceau sans se soucier de musicalité pour permettre à l’acteur de dire son texte… Le rapport à la musique est alors purement utilitaire ; on n’écoute pas la musique : elle n’est là que pour nous distraire de ce que nous ne devons pas voir.

Comme un texte littéraire, un texte musical, pour peu qu’on lui fasse confiance a toujours beaucoup à proposer, beaucoup plus qu’on ne pense…

Les différents rendez-vous que nous proposerons pour préparer les Rencontres Nationales de la Marionnette en novembre 2009 seront ainsi l’occasion d’aborder et de développer ces questions (et d’autres - multiples !) autour du rapport à la musique dans les arts scéniques et notamment les arts de la marionnette, et de favoriser des rencontres entre musiciens, compositeurs et marionnettistes. Par ailleurs, une page internet sera mise en place dès la rentrée sur le site de THEMAA, sur laquelle  je donnerai quelques pistes à explorer : concerts, disques à écouter, ouvrages, films…etc.


Anne Bitran

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